La Cour de Justice de l’Union européenne s’est à nouveau penchée, en répondant à une question préjudicielle, sur l’interprétation de l’exemption de TVA applicable aux prestations de soins. Le litige oppose une compagnie d’assurance hongroise à l’administration nationale des impôts et douane hongrois.
1- La disposition légale concernée
L’article 132 de la directive TVA, qui figure au chapitre 2, intitulé « Exonérations en faveur de certaines activités d’intérêt général », dudit titre IX de cette dernière, prévoit, à son paragraphe 1 que :
« Les États membres exonèrent les opérations suivantes :
c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l’exercice des professions médicales et paramédicales telles qu’elles sont définies par l’État membre concerné ».
Cette disposition a été implémentée à l’article 85 § 1, du Code TVA hongrois.
2- Les faits
La société hongroise commercialise un produit d’assurance maladie en vertu duquel elle s’engage, sous certaines conditions, à fournir à la personne physique assurée des soins de santé à l’étranger pour cinq maladies graves. Conformément à ce contrat, l’assuré n’a pas droit au service d’assurance en cas d’affections aiguës ou de maladies qui n’ont pas encore été examinées par un professionnel de santé local.
Afin de pouvoir fournir les services d’assurance, la société requérante au principal a conclu un contrat de collaboration avec Best Doctors España SAU (ci-après « Best Doctors »), société de droit espagnol.
En vertu de ce contrat de collaboration, Best Doctors est chargée :
- D’une part, de procéder au réexamen, par ses médecins, des informations médicales concernant la personne physique assurée sur la base de la documentation qui leur est envoyée, afin de vérifier si cette personne peut effectivement bénéficier des services d’assurance ;
- D’autre part, Best Doctors se charge de toutes les formalités administratives relatives aux soins à l’étranger. Ce service comprend, notamment, la prise de rendez-vous avec les prestataires de services médicaux, l’organisation du traitement médical, de l’hébergement à l’hôtel et du voyage, la fourniture d’un service d’assistance à la clientèle et la vérification du caractère approprié du traitement médical. En outre, Best Doctors assure également les paiements et le suivi des créances médicales. En revanche, Best Doctors n’est pas responsable de la couverture des frais de transport et d’hébergement ainsi que des frais des soins de santé.
Best Doctors perçoit une rémunération annuelle par patient.
Best Doctors a émis des factures sans TVA à la société hongroise, en 2012, la société hongroise n’a pas autoliquidé de TVA sur celles-ci considérant que les prestations étaient exemptées de TVA sur base de l’article 132 de la directive TVA. La société d’assurance considère qu’il s’agit de prestations qualifiées de diagnostics.
Suite à un contrôle TVA, l’administration fiscale hongroise a réclamé le paiement de la TVA, les amendes et les intérêts de retard.
Suite à la procédure administrative et juridictionnelle, un pourvoi en cassation a été introduit devant la Cour Suprême hongroise (la Kùria).
3- Question préjudicielle
La Cour Suprême hongroise a posé, à la CJUE, la question préjudicielle suivante :
« L’article 132, paragraphe 1, sous c), de la directive [TVA] doit-il être interprété en ce sens qu’il y a lieu d’exonérer de la taxe un service utilisé par une compagnie d’assurances afin :
– de faire vérifier l’exactitude du diagnostic d’une maladie grave diagnostiquée chez la personne physique assurée, et
– de pouvoir trouver les meilleurs services de soins de santé possibles en vue de la guérison de la personne physique assurée, et
– si cela est couvert par le contrat d’assurance et que l’assuré en fait la demande, de faire en sorte que le traitement médical soit dispensé à l’étranger ? »
4- Arrêt de la CJUE
Contexte
La CJUE rappelle que les exemptions de TVA sont d’interprétation stricte.
Elle rappelle également que l’exonération visée à l’article 132, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA doit répondre à deux conditions :
1/ Constituer des « prestations de soins à la personne » et,
2/ Etre « effectuées dans le cadre de l’exercice des professions médicales et paramédicales telles qu’elles sont définies par l’État membre concerné ».
Développements
L’analyse du dossier médical par Best Doctors sur base de la documentation communiquée en confirmant ou en infirmant le diagnostic posé par le médecin de l’assuré, Best Doctors effectue une prestation qualifiée d’expertise médicale.
Le but u voyage, le service d’assistance à la clientèle et la vérification du caractère approprié du traitement proposé ; ceux-ci ne peuvent bénéficier de l’exemption de TVA.
Ces prestations ne répondent pas aux deux conditions de l’exemption, il s’agit de prestations de nature administrative.
Conclusion
Par conséquent, il convient de répondre à la question préjudicielle que l’article 132, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA doit être interprété en ce sens que des prestations consistant à vérifier l’exactitude du diagnostic de maladie grave chez l’assuré pour déterminer les meilleurs soins de santé possibles en vue de la guérison de l’assuré et faire en sorte, si ce risque est couvert par le contrat d’assurance et que l’assuré en fait la demande, que le traitement médical soit dispensé à l’étranger ne relèvent pas de l’exonération prévue à cette disposition.
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Aurélie Soldai
Avocat au Barreau du Brabant Wallon – Cabinet d’avocats Aurélie Soldai SRL
Source : https://curia.europa.eu/