Le Conseil d’État a rendu, le 4 décembre 2020, un arrêt illustrant la problématique des circulaires à caractère réglementaire par lesquelles l’administration fiscale tend parfois à se substituer au législateur.
En aout 2020, nous relevions l’adoption de la circulaire 2020/C/73 du 26 mai 2020 relative à l’exemption de TVA propre aux prestations ayant pour objet l’orientation scolaire ou familiale ainsi que les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées (article 44, §2, 5° CTVA).
Ladite circulaire commentait l’application de l’exemption aux professions relevant du domaine psychologie, de l’orthopédagogie et de la psychothérapie.
La circulaire précise que :
- Pour les psychologues, ceux-ci doivent être titulaires du titre professionnel requis et être inscrits sur la liste de la commission des psychologues
- Pour les orthopédagogues, il convient en outre qu’ils soient agréés
Par contre, pour les prestations de psychothérapie, elle différencie les situations suivantes :
- Médecins ainsi que psychologues et orthopédagogues agréés : exemption de TVA
- Catégories pouvant bénéficier des droits acquis (art. 68/2/1 de la loi du 10 mai 2015)
- Exemption possible de TVA à partir de la publication de l’arrêté royal permettant aux psychologues et orthopédagogues d’être agréés, soit depuis le 1er janvier 2020 ;
- Pas d’exemption pour les personnes qui exerçaient déjà la psychothérapie au 1er septembre 2016 mais qui ne rentrent pas dans les conditions pour bénéficier des droits acquis.
Nous relevions que l’absence d’exemption pour cette dernière catégorie était potentiellement illégale dans la mesure où la Cour constitutionnelle a décidé par son arrêt n° 39/2017 du 16 mars 2017 que les personnes ne pouvant bénéficier du droit acquis sur base de la loi pouvaient néanmoins continuer à offrir des services de psychothérapie sans condition supplémentaire en attente de mesures transitoires.
Le Conseil d’État a rendu ce 4 décembre 2020 un arrêt n° 249.140 de suspension car il a estimé à juste titre selon nous que la circulaire 2020/C/73 était réglementaire dans la mesure suivante :
« la circulaire prend attitude, en excluant les prestations de psychothérapie fournies par cette catégorie de personnes de l’exemption de TVA alors que le législateur doit d’abord déterminer les mesures transitoires qui doivent être prises à leur égard. Sur ce point, la circulaire attaquée devance le législateur et ne peut être qualifiée de circulaire purement interprétative ».
Pour qu’il soit question d’une circulaire réglementaire au sens de la jurisprudence constante du Conseil d’État, il faut que la circulaire :
- contienne des règles nouvelles et pas seulement informer son destinataire ou lui proposer une interprétation non contraignante de règles en vigueur;
- rende ces nouvelles règles obligatoires et être rédigées à cet effet en termes impératifs
- émane d’un auteur qui dispose du pouvoir d’imposer sa volonté au destinataire de son texte et de le sanctionner le cas échéant.
Une communication de l’administration fiscale serait la bienvenue quant au régime qu’elle entend appliquer suite à cette suspension.
Affaire potentiellement à suivre au contentieux de l’annulation ou nouvelle circulaire, donc…
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